Une transition qui invite le renoncement dans un débat sain et responsable.

« Même un simple effort de changement, aussi petit et autonome soit-il, conduit inévitablement à la nécessité de traiter à la fois les aspects vivants et mourants de la transformation. »

Une exploration pour 2024-25

L’exnovation est un terme lié à la transition, généralement dite écologique de façon réductrice, et donc au changement, à la transformation.

L’exnovation désigne « les processus de déstabilisation, déclin et abandon des industries, technologies et pratiques à forte intensité carbone et/ou soulevant d’autres problèmes systémiques de durabilité (environnementaux, socio-économiques, urbanistiques, etc.). » (exnovation.brussels) Elle questionne la croissance verte et ses limites, et invite à la réflexion, à un débat de société, sur de nécessaires réorientations et, par là, à des renoncements.

L’exnovation questionne la sortie délibérée de configurations sociotechniques (liens entre différents acteurs économiques et sociaux autour d’un produit ou d’un service) non durables de l’économie. Il s’inscrit donc en phase avec les notions de limites planétaires du SRC, l’économie du Donut, ou les alertes du GIEC, qui démontrent de nécessaires transformations dans notre modèle de société.

Le concept entend se différencier du déclin « subi », en appelant à identifier les problèmes de non-durabilité systémiques et à penser les stratégies de sortie, les principes de planification démocratique et de justice sociale qui les meuvent, ainsi que l’incertitude associée aux instruments politiques adaptés.

Le concept, pourtant essentiel et intrinsèque à la notion même de transition, est encore très peu développé et connu en dehors du monde de la recherche. Notre société se débat avec une durabilité additive, l’exnovation amène la question difficile et dangereusement idéologique de renoncements manifestement nécessaires.

L’exnovation est liée à l’idée de renoncement, un principe que notre évolution n’a pas rendu habituel, et donc à la notion de deuil… ce qui invite à nous questionner rapidement sur les liens culturels que ces processus impliquent et portent.

Cette notion nous concerne tous. Tous les acteurs, leur complexité, les croyances limitantes attachées, des dépendances aux chemins (dont les investissements), etc. qui doivent pouvoir être urgemment explorées, débattues :

  • Politiques : faire de l’exnovation un enjeu politique intentionnel de débat et de pratique stratégique, absolument non idéologique ;
  • Entreprises : prendre conscience et accepter les limites planétaires, évaluer les modèles économiques et les actifs existants, pour envisager des redirections écologiques progressives. Un questionnement difficile, audacieux et bien au-delà du respect des règles venant des directives européennes ;
  • Territoires : questionner son essence et ses spécificités, prendre conscience des interdépendances, questionner les limites, construire des dialogues biorégionalistes innovants et audacieux ;
  • Citoyen·ne·s : prendre conscience de leur rôle, questionner le changement en invitant le renoncement, explorer ce que cela génère, ouvre comme champ, ou demande de nous…


L’exnovation
a régulièrement été explorée en animation par TerraLab au travers de différents outils d’animation liés à la transition écosystémique. Il suscite toujours un vif intérêt et questionnement, et il nous a semblé opportun de l’étudier et de le faire connaître.

Quelques questions et réponses

TerraLab vise à mener en 2024-2025 une exploration ouverte du concept, comme ressource pour questionner les transitions et les changements que cela implique. Ceci nécessite une réflexion critique et des nuances, adaptées aux contextes et aux acteurs.
Les explications suivantes se veulent donc introductives pour nourrir la réflexion, et seront questionnées et critiquées lors d’évènements par des experts et des acteurs territoriaux.

Non, pas directement et pas nécessairement.

Si l’exnovation est une approche soustractive de la transition (à quoi devons-nous, acceptons-nous de, renoncer dans notre nécessité collective d’activer une transition écologique et sociale), elle n’implique pas nécessairement une décroissance au sens économique du terme.

Renoncer à la voiture individuelle peut par exemple être vu comme signe d’une décroissance au vu du nombre de travailleur·se·s lié·e·s et du PIB des Etats qui en découlent, et ce n’est pourtant peut-être pas le cas si on regarde le champ des nouvelles activités que cela ouvre.

Le questionnement de l’exnovation porte entre-autre sur le fait que les renoncements soient subis ou choisis. Or le choix bien anticipé d’une « nouvelle manière » de voir notre mobilité peut en l’occurance permettre une réorientation stratégique progressive des activités économiques, des emplois… Simple ce n’est pas, mais impossible non plus.

Bien sur, dans l’ensemble, cela pourrait créer des récessions, des chocs boursiers ou autre, et les économistes s(er)ont à pied -d’œuvre pour en discuter. Le débat pourrait aussi porter alors sur les indicateurs de cette « croissance », son lien direct et inéluctable aux énergies fossiles (notamment par effets rebonds), donc à la pollution et à la situation écologique de notre planète qui nécessite, de façon évidente, du changement rapidement. Savoir si cela va générer ou non une décroissance économique, implique un ensemble d’éléments complexes que nous ne pourrons explorer avec TerraaLab. Mais dans le fond, est-ce bien là le débat ?

Sans vouloir évacuer cette question, en soit profondément liée, nous désirons nous concentrer sur d’autres dimensions de la question du renoncement.

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Voilà une question difficile qui repose probablement plus sur du dogme et des émotions, et non sur les faits. Ces derniers sont évidents.

Six des neuf limites planétaires (Stockholm Resilience Center) sont dépassées. Nous avons donc passé des points de bascules qui risquent bien de dérégler totalement l’équilibre de notre bioplanète et donc sa capacité à assurer la survie de l’humanité.

A l’heure actuelle, le « problème » mis au devant de la scène est celui des gaz à effet de serre (GES). S’il est en théorie relativement soluble, le pari des énergies renouvelables et du découplage énergétique est pourtant globalement perdant,  nous continuons à extraire toujours plus de ressources et à émettre toujours plus de déchets et de pollution, et de GES… On ne parle du coup pas assez des autres enjeux criants : les impacts catastrophiques sur la biodiversité, l’eau douce et marine, les sols, notre santé…

Le débat est donc à nouveau ramené à un choix dual entre le pari qu’on trouvera des solutions (technologiques) à tous les problèmes générés par notre modèle actuel et le fait d’opérer certaines réorientations, et certains renoncements. Mais dans l’ensemble, notre société semble préférer actuellement changer le moins possible… nous préférons verdir et tenter désespérément de limiter nos impacts. Et puis soyons honnêtes, le terme est désagréable. Qui aime renoncer à des choses qu’il aime, ou croit aimer ?

Alors est-ce le bon choix ? Qui sait, mais en tous cas, TerraLab préfère toujours les ET aux OU…

D’ailleurs, le renoncement ne nous oblige pas à rejeter tous les merveilleux bénéfices de nos technologies et de notre science, à revenir à l’âge de pierre comme le dirons vite les détracteurs et les techno-optimistes qui préfèrent réduire le débat.

TerraLab désire donc explorer le sujet avec équilibre, et non accroché à un dogme écologiste ou via des raccourcis idéologiques. Nous désirons chercher à comprendre ce que le sujet génère comme blocages et émotions, notamment au travers d’une exploration de cas, et chercher collectivement des leviers pour rendre le renoncement… politique pour rappeler l’ouvrage d’Alexandre Monin.

Donc la question n’est selon nous pas de savoir s’il faut renoncer, mais à quoi et comment.

Nous en rechercherons d’avantage et les explorerons collectivement dans les prochains mois, mais nous pouvons déjà citer quelques exemples.

Ce qui nous intéressera dans les renoncements choisis, et sur la question en général, seront les raisons, les difficultés, les approches idéologiques ou au contraire concertées, leur approche méthodologique et stratégique de changement systémique (ou leur absence), les effets rebonds, etc.

Retenons déjà :

  • le renoncement subi de la fin du charbon
  • le renoncement choisi de la fin du nucléaire en Allemagne
  • le renoncement de Mustella (produits pour bébé essentiellement) de renoncer à son produit phare des lingettes bébés non biodégradables et de resserrer sa gamme vers du circulaire
  • le renoncement de la station de ski Métabief Jura qui, réalisant le risque de ne pas pouvoir amortir le renouvellement de ses installations, a décidé de renoncer au ski alpin
  • le renoncement d’une ville de remettre en état sa piscine publique devant le coût et l’impact écologique, et de réorienter ce « commun négatif » (on en reparlera) en tiers-lieux
  • et près de chez nous, le renoncement de Bruxelles à la vitesse de 50km/h avec son plan GoodMoove très décrié idéologiquement
  • Etc !

Quelques ressources en lien, et plus à venir

Agenda

En 2024-2025, TerraLab :

  • organisera des conférences et des ateliers sur ce thème, 
  • partagera des contenus et des réflexions,
  • et réalisera un guide de réflexion et d’animation. 

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Un autre sujet sera exploré en parallèle par TerraLab, et parfois de façon croisée : le biorégionalisme.

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